Réglement de compte au Labyrinthe

Plusieurs jours, semaines, je ne me rendais plus compte du temps qui passait dans ce labyrinthe. Nuit, jour, soleil ou pluie, l'extérieur n'avait plus d'importance, seul mon objectif comptait.

Après avoir tourner des heures une fois de plus, j'arrive dans une salle identique aux autres, seules les personnes étaient différentes. Des corsaires comme moi, toutes nations confondues, le regard fou ou perdu, les plus forts s'en sortiront indemnes. Les autres...

J'installe mon campement de fortune près d'une muraille, une femme est déjà assoupie, je m'approche d'elle et retient un petit cri de surprise en découvrant son identité.

Clémente ?

Clémente sursauta en entendant son nom. Perdue dans ce labyrinthe, elle n'avait guère plus d'identité, avançant comme une âme en peine, parmi d'autres esprits fatigués. Craintive, elle dégaina son scalpel en direction de la voix, prête à attaquer avant d'avoir à se défendre.

Reconnaissant Kristal, sa main hésita, se mit à trembler.

Kristal ?

Elle regarda son arme, puis à nouveau vers la lyssoise, avant de finalement baisser la main.

Quelle idée de venir perturber mon sommeil !

Je regarde l'arme que tient Clémente, elle n'oserait pas s'en servir sur son ex sœur.

ne soit pas idiote, je ne te veux aucun mal, on est dans le même pétrin ici, alors range moi ça et vite.

Cela fait longtemps que l'on a pas pu se parler juste toi et moi. Depuis ton départ du Lys, nous nous sommes éloignées, je garde pourtant un bon souvenir malgré tes nombreux excès de folie, ne te vexe pas hein, mais tu as quand même un fichu caractère.

Je sors de mon sac une petite fiole et en boit une gorgée, puis je la tend à Clémente.

Vas y, goûte moi ça, ça te permettra de ne pas devenir encore plus folle ici... dis je en rigolant.

Clémente regarde un instant Kristal avec méfiance. Tous les souvenirs lui remontent à la surface. Les menaces, l'agression de Montmorency, la solitude... Elle range finalement son scalpel, et accepte la fiole. D'un air boudeur, elle répond.

Je ne suis pas folle moi. C'est les autres.

Elle hausse les épaules et boit plusieurs gorgées avant de rendre la fiole à Kristal.

C'est plutôt agréable de te voir ici, tu m'as manquée, plus que n'importe qui au Lys. Comment va Rohel ?

Comment ça les autres ? mais ma pauvre, tu ne t'es pas rendue compte du bazar que tu as mis à toi toute seule ? tu es la seule responsable ma bichette.

Franchement, à l'époque, je t'aurais eu devant moi...je crois bien que je n'aurais pu résister à te mettre deux baffes comme à une sale gamine qui fait des caprices. Tes talents de séductrice marche fort bien avec beaucoup de monde, mais pas avec moi, je sais ce qu'il y a derrière tout ça.

Et ne me prononce plus le nom de Rohel, si tu veux bien. Tu es parfaitement au courant, alors ne joue pas à ce petit jeu avec moi.

Avale cul sec une deuxième fiole

Elle avait fait mouche. Elle cache un sourire mesquin et satisfait en fouillant dans son sac. Ayant réussit à reprendre un visage impassible, elle relève la tête, brandissant une bouteille de rhum.

Ah. Un vrai sac de fille, impossible de trouver ce qu'on veut du premier coup.

Ne revenons pas sur ce mandat, veux tu. La confrérie aurait pu me comprendre si elle l'avait vraiment voulue. Inutile de revenir sur le passé et ce qui aurait pu arriver si vous m'aviez accordé le bénéfice du doute et quelques discussions, comme dans une vraie famille.

Pour Rohel...

Agacée, elle s'apprête à dire quelque chose mais regarde Kristal, un petit air soucieux au visage en constatant que
la fiole est vide. Elle hausse finalement les épaules, elle n'est pas
sa nounou après tout, elle a Alex pour ça.

Pour Rohel, désolée, j'avais oublié l'espace d'un instant. Je suis pourtant bien placée pour savoir qu'il est libre désormais. Moi et ma tête de linotte.

Manque de s'étouffer et crache la dernière gorgée qu'elle venait d'avaler

Tu cherches quoi Clémente là en me disant ça ? A me faire mal ? il n'y a que ça qui te rend joyeuse ? la peine et la souffrance des autres ? Et tu te dis mon amie ? je pense qu'on a pas la même définition de ce mot.

Je ne répondrais donc pas à ta provocation. Que Rohel et toi vous ayez une relation, ça ne me regarde pas. Que se soit toi ou une autre, hein, je préfère préciser pour pas que tu me balances à la figure la liste de ses supposées maîtresses, je t'évite ainsi d'utiliser ta salive pour rien. Sache que si Rohel s'amuse, il en est de même pour moi.

Pense intérieurement : je vais rester zen, crois moi, je vais pas te faire ce plaisir.

Constate que sa chemise est toute mouillée, cherche dans son sac de quoi se changer.

Et merde ! je l'ai oublié ! passe moi le tien dis je énervée à Clémente.
Tu dois bien avoir quelque chose à me prêter.

Loin d'être décontenancée, Clémente éclate de rire :

Allons ma Kristal, je croyais que la rupture était consentie des deux côtés ! Ne t'enerve pas comme ça, Rohel pourrait croire que tu ne supporte pas la séparation.

Calmement, elle ouvre sa bouteille de rhum et se met à boire.

Mais tu as l'air tellement à fleur de peau ma chérie. Il est vrai que je passe beaucoup de temps avec lui, mais si tu ne veux pas savoir, je ne te dirais donc pas comment j'ai apprit ta rupture, ni même comment Rohel se console, et encore moins la relation que je peux entretenir avec lui.

Elle passe une main dans ses cheveux avec un sourire malicieux :

Je suis ravie que tu t'amuses, je ne manquerais pas de le lui faire savoir. Sincèrement, je n'aurais pas voulu que tu restes triste, il y a tellement d'hommes qui seraient heureux de prendre dans leurs bras une femme si belle que toi...

Elle pousse alors son sac vers toi :

Sert toi, mais tu fais une taille de plus que moi, je ne sais pas si tu vas trouver quelque chose qui te vas.

Je me relève, attrape le poignet de Clémente et le maintient fermement

Arrête tout de suite...conseil d'amie...

Seuls mes vrais amis, auraient pu voir à mon regard et à mes réactions que je n'étais pas simplement énervée ; qu'au stade où j'en étais actuellement, d'autres réactions beaucoup plus brutales montaient en moi tout doucement et eux seuls savaient me calmer.

Je pense à eux, je mémorise leur visage, ils sont là tout près de moi... le rythme de mon cœur ralentit petit à petit, je reprend le contrôle de mes émotions.

Je lâche brutalement le poignet de Clémente. D'un ton calme et serein, je la regarde droit dans les yeux

Je t'en prie, dit lui, il sera heureux pour moi tout comme je suis heureuse pour lui.

Puis je me mets à fouiller dans sa besace et trouve une chemise qui fera l'affaire. Mes yeux s'attarde sur un vêtement en particulier. Je fais mine de rien voir pour le moment.

Je l'enfile et ferme avec difficultés les boutons. Ma poitrine risque de les faire sauter un par un à tout moment mais on fera avec.

Tu as raison, je fais bien une taille de plus que toi lui dis je avec un grand sourire.





.

Bouche bée, Clémente porte sa main à son poignet pour faire passer la douleur. Elle avait poussé à bout Kristal, elle savait très bien en commençant que ça finirait comme ça. Culpabilisait-elle d'avoir ravivé les souffrances de son ancienne alliée ? Certainement. Mais ses propres blessures étaient plus fortes que les vieux sentiments. Sa colère était plus forte que l'envie de protéger une ancienne amie.

Voir sa poitrine déborder et son air fanfaron arracha pourtant un sourire à Clémente. Kristal commençait à devenir aussi provocatrice qu'elle, et cette ressemblance n'était pas pour lui déplaire. Elle reprit son sac et le ferma.

Quel bonheur alors si nous sommes tous les trois heureux.

quatre Clémente...

Je la regarde refermer son sac. Que faire...il fallait pourtant que je vérifie. Il n'y avait pas beaucoup de solution, autant être direct.

Je tire d'un coup sec le sac vers moi, que je cale soigneusement entre mes jambes, les bras croisés dessus. Je la regarde à mon tour avec un sourire malicieux.

Mais Clémente, quel empressement ! Je suis curieuse de savoir ce qu'une femme aussi belle que toi, cache dans son sac. Tu n'as pas des petits secrets, des petites astuces de beauté, crème, parfum, lingerie...enfin quand même ! ne sois pas si égoïste, moi ton amie, ton ex sœur !

Clémente fronce les sourcils, se demandant à quoi elle pouvait bien jouer. Elle réfléchit rapidement, puis :

Si ça t'amuses.

Et reprend une gorgée d'alcool, regardant en coin Kristal. Elle avait changé, ou c'est qu'elle ne s'y connaissait pas.

Après tout, je peux comprendre que tu veuille savoir ce que cache une vraie femme dans son sac, maintenant que tu es libre d'être séduisante.

Puis elle éclate de rire.

Une vraie femme ! rigole

Mais sais tu ce que c'est une vraie femme ? bon allez, un jour je te dirais en quoi ça consiste. Bref... je peux ? tout en ouvrant le sac sans attendre.

Je vois que c'est aussi bien rangé que dans le mien !

Je sors un petit pot de crème
Bientôt il faudra penser à l'anti-ride ma chérie, fait attention. Le temps passe vite.

Puis le parfum que j'ouvre pour apprécier sa flagrance.
Ouch ! on peut pas passer inaperçu avec ça, il est comment dire...ennivrant.

Superbe ! alors là chapeau ! ce porte jarretelle est magnifique ! J'examine la marchandise sur toutes les coutures et tire légèrement sur les élastiques

Tu n'as pas peur qu'ils lachent ? Ils me semblent un peu petit pour tes cuisses. Oh..remarque...tu les gardes pas longtemps...

Ma main se posa sur le vêtement que j'avais aperçu tout à l'heure. C'était bien ce que je pensais.

Mon ton devient des plus sérieux.

Clémente, c'est la livrée du Lys, pourquoi l'as tu encore ?

Laisse faire Kristal sans s'énerver, éclatant de rire au moment du porte jarretière.

Tu apprendras que la plupart des hommes aiment quand on les garde. Tu n'as pas trop eu l'occasion de le constater, mais ça viendra.

Ses yeux s'allument d'une petite flamme quand elle sort la livrée du lys. Son air déterminé dévoile tout de ses intentions.

Je n'allais pas me séparer d'un cadeau si précieux, n'est-ce pas ? Cette livrée est superbe, et m'est utile en de nombreuses occasions.

Cette livrée ne peut être portée que par les membres du Lys. Je suis désolée que tu y sois attachée mais tu ne peux pas la garder.

Soupir

J'aurais tant aimé que tu puisse la garder...cela voudrait dire que tu fais encore partie de la famille.

Clémente, réfléchis un peu et soit pour une fois honnête, laisse de cotés tes chichis et tes principes.
Tout le monde a été touché par cette affaire, je sais que tu en gardes des blessures et des rancœurs, moi aussi, eux aussi. Nous avons été plus que bouleversés. Et pourtant, nous nous relevons et nous nous parlons de nouveau.

Je vais pas te supplier ni me mettre à genoux. Tu sais ce que c'est la fierté...
Je te demande simplement de me la redonner. Par ce geste, tu prouveras à tous que tu vaux bien plus que tout ce qui a été dit sur toi.

Et personnellement, j'aurais la confirmation que tu es et que tu as toujours été quelqu'un de bon.

Je remets la livrée dans le sac que je tend à Clémente.

Un air triste sur le visage, Clémente regarde longuement le sac que Kristal lui tend. Il serait si facile de se laisser amadouer pas ces sages paroles, de rendre la livrée, et de continuer son chemin sans plus guère d'attaches. Mais la sagesse n'était pas le fort de Clémente. Si elle avait put en avoir, quand elle était encore entourée, sa vie d'aujourd'hui n'en avait plus une once. Ce fut avec colère qu'elle prit son sac des mains de kristal et le protégea jalousement.

Si pour vous quitter la confrérie veut dire tout oublier, alors vous ne méritez pas que je vous offre un esprit serein.

Elle ressert sa prise sur le sac, farouche :

Vous pouvez bien penser de moi ce que vous voulez, je n'ai plus guère besoin que vous m'estimiez.

Provocatrice, elle rajoute :

Je la garde, et ne me provoquez pas, sans quoi elle pourrait bien avoir d'autres usages qu'au fond de mon sac.

Et bien on dirait que je me suis trompée !

Tu sais ce que tu mérites, c'est de finir encore plus seule que tu ne l'es. Tu me fais pitié ma pauvre, regarde toi là ! tu deviens pitoyable.
Et moi qui pensais qu'en fait...non...rien

Je t'ai jamais dit que quitter la confrérie voulait dire tout oublier. Cela fait partie de ton passé, tout simplement, mais faut l'admettre.
Et puis il faut grandir aussi ma petite, et avancer, voir un peu plus loin que le coin de la rue et avoir comme objectifs autres choses que tes misérables distractions journalières qui se résume à pas grand chose mis à part la séduction.
Tu excelles dans ce domaine, mais dans le reste tu prends un retard phénoménal. Quand tu seras vieille et aigrie, qu'est ce qu'il te restera ? des amis, c'est sur qu'en se comportant comme ça, non ...Des amants ? ça m'étonnerait fort, d'autres jeunes filles auront su prendre ta place.

Et puis tu sais, t'inquiète pas, on attend pas après toi pour avoir un esprit serein, nous nous l'avons déjà retrouvé.
C'est juste une question de principe. Mais ce mot tu dois pas connaitre non plus.

Tu crois que tu me fais peur avec tes menaces ? Ton sac j'en fais ce que je veux, c'est à toi de ne pas me provoquer.

Les poings serrés, Clémente ne répond pas immédiatement. Elle attend un peu, respirant profondément. Ses ongles s'enfoncent dans la paume de sa main. Elle lâche un rire cynique :

Crois-tu vraiment que ta vie est meilleure que la mienne, mais regarde toi deux minutes ma pauvre amie. Tu veux vraiment jouer au jeu de celle qui fera le plus mal ?

Tu ne t'attaches qu'aux apparences, au qu'en dira t-on. Une simple livrée en dehors vos rangs vous panique. Il a suffit que j'aille de l'autre côté de votre chemin bien tracé l'espace d'un instant, pour qu'en un claquement de doigt vous me fassiez disparaitre de vos vies. L'amitié pour vous ? Ceux que vous dites aimer doivent suivre votre carcan, sous peine d'une condamnation sans appel. Crois-tu que ce genre de considération est mieux que ma façon d'agir ? Je ne promet rien, moi.

Tu me fais des leçons sur ma solitude, mais sais-tu seulement à quoi ressemble ma vie ? Alors que la tienne, ton quotidien, je le connais, vous êtes incapables de changer.

Oh, si c'est vrai, il y a eu un changement, et quel changement ! Notre pauvre Kristal s'est séparée de son Rohel. Que s'est-il passé Kristal ? Il ne te faisait plus vibrer ? Tu t'ennuyais ? Il avait besoin d'être à nouveau séduit ? Ton petit quotidien vous a brisé n'est-ce pas ?

Tu es libre, désormais, et en profite pour séduire d'autres hommes. Chose étrange, ça me rappelle quelqu'un.

Elle lorgne sur les muscles fort peu féminins de Kristal :

Oh c'est sûr que tu pourrais me frapper et obtenir de moi ce que tu veux, mais es tu seulement capable de franchir ce cap ? Oserais-tu te mettre dans le rôle de la colérique ? De celle qui vole les autres pour obtenir ce qu'elle n'a pas ?

Deviendras tu comme moi, Kristal ?

Flanque un aller retour sur le visage de Clémente

Eh bien, ça fait du bien secoue sa main

D'un ton calme
Je t'avais averti de ne plus prononcer le mot de Rohel et de ne pas me provoquer.

La solution la plus intelligente aurait été en effet que je ne réagisse pas. Mais...tu sais quand on m'ennerve, je suis loin d'être la femme raisonnable qu'on croit connaitre.

Tu n'es pas restée assez longtemps au Lys pour te permettre de juger ainsi. Je n'en dirais pas plus car c'est moi et uniquement moi qui suit devant toi ce soir et pas les Lyssois. La demande que je t'ai formulé n'avait rien d'officielle.
Par contre, là où tu as raison, c'est qu'en effet, je suis libre, entièrement libre vois tu et pas seulement au sens où tu le décrit. Je fais ce que je veux, avec qui je veux quand j'en ai envie et c'est ça la liberté.
J'ai une famille, une maison, des amis qui sont là quand j'en ai besoin. Cela implique peut être des concessions qui sont loin d'être insurmontables, faut juste avoir une capacité à comprendre et analyser. La vie en communauté, c'est le partage et le respect des uns et des autres, peu importe les personnes que tu as devant toi. Mais pour que ça fonctionne, il faut des régles, des gardes fous, et c'est cela ton problème, tu étais prête à recevoir, ça oui, mais sans contrainte.

Ta rancoeur est si laide à voir...

Je t'ai tendu la main ce soir, tu l'as refusé. Je continue de penser, surement à tord diront certains, que ton cas n'est pas désespéré.

Je me rassois et m'adosse au mur, les jambes repliées sur moi.

Alors vas-y parle moi de ta vie maintenant.

La main portée à sa joue, elle tente de faire bonne figure. Elle aurait pu venir la gifler aussi, mais à quoi bon ? Partir dans une bagarre, elle en savait déjà la conclusion. Kristal agissait en face, avec sa force, Clémente, elle, privilégiait l'action discrète. Un sourire lui vint aux lèvres, tandis qu'une bouffée de tendresse lui gonflait le cœur.
A l'époque, pas si lointaine, du Lys, c'est leurs différences qui les avaient rapprochées. Clémente, attirée par le bonheur qu'on lisait sur le visage de Kristal, par cette femme en qui on pouvait lire, fidèle, franche et volontaire. Clémente ne pensait pas se tromper en disant que Kristal l'avait aimée pour son mystère, ses extravagances, et voulant la protéger de ses propres démons. Aujourd'hui, ces contradictions avaient créés une barrière qui semblait insurmontable.

Clémente prit exemple sur Kristal et s'adossa également au mur :

Oh tu sais, toujours la même chose, sauf que je dors plus dans le même lit. Baern a quitté la Confrérie, tu savais ? Je pensais que je pourrais passer plus de temps avec lui, mais il est toujours à vadrouiller, sans que je ne sache où il se trouve. Je m'occupe comme je peux. Mon fils, Maxence, heureusement me prends beaucoup de temps. Je me console ailleurs. Rohe..Euh... Certaines personnes en particulier me permettent d'avoir l'esprit occupé.

Un cailloux dans la main, elle se met à jouer nerveusement avec. Les confidences, ce n'était pas son fort, les mots ne sortaient pas naturellement, et elle avait bien du mal à éviter encore les provocations.

Sinon, comme d'habitude, errer dans les rues à la recherche de miséreux. Pour les soigner, bien entendu. Que dire d'autre ? Pas grand chose. Ce labyrinthe est une plaie.

Le moment était aux confidences, Clémente lâchait un petit bout de sa vie, et moi, j'en étais arrivée à faire le point sur la mienne.
Nous avions l'air de deux petites idiotes assises comme des malheureuses dans ce labyrinthe miteux.

Les hommes se ressemblent beaucoup tu sais, que ce soit Baern, Rohel ou d'autres, leurs occupations prennent le dessus un jour ou un autre, nous laissant seules avec nos attentes. Au moins, nous avons ça en commun.

Tu as bien raison de t'occuper l'esprit, je ne l'aurais jamais fait avant que...mais maintenant, c'est tout autre, je veux m'amuser et profiter de chaque jour qui passe au grès de mes envies, qu'elles soient rationnelles ou non. Toi tu as ton enfant, moi, je n'ai que mes souvenirs.

Je lui caresse amicalement sa joue

Je suis désolée pour la gifle mais il faut avouer que tu as un don particulier pour pousser les gens à bout.
Remarque c'est peut être ça que j'apprécie chez toi en fait. Tu me permets d'aller au plus profond de moi même, tes mots, ton attitude, tes excès représentent pourtant tout ce que je déteste. Tu es mon opposée mais si proche en même temps.

Comme une idiote, Clémente porte une seconde fois sa main à sa joue, regardant avec de grands yeux interrogatifs Kristal. La gentillesse, la tendresse, elle n'avait pas l'habitude. Pas dans ce genre là en tout cas. Elle recommence à jouer avec son cailloux, cherchant à camoufler du mieux possible sa gène.

Il faudra que tu me dises qui est ce mystérieux homme avec lequel tu suis tes envies. Pour que je te pardonnes de cette gifle.

A l'intérieur d'elle même, les pensées se mélangeaient. Allons, qu'as tu à faire d'elle ? Elle retournera à ses occupations, et toi, que deviendras-tu ? Il fallait mettre fin à l'entrevue. Elle met son sac sur son épaule, et s'apprête à se relever :

Bon et bien, on a finit avec cette discussion non ? Je vais retourner à la recherche de la sortie...

Je pose ma main sur l'épaule de Clémente, l'invitant à rester assise.

Non...on a pas fini, juste dévié légèrement du sujet principal.

Pour ce qui est de ton pardon, je n'en ai pas besoin et ma vie privée ne regarde que moi. Est ce que je te demande la liste de tes amants moi ? non, bon alors, ne soit pas si curieuse. C'est un vilain défaut.

Je regarde son sac d'un air pensif. Il serait si facile qu'elle reste là, qu'elle s'endorme. Profitant de son sommeil, je lui subtiliserai la livrée et partirai loin de ce labyrinthe, loin d'elle. L'objet convoité, serait ainsi de retour dans sa demeure, et tout rentrerait dans l'ordre.
Etais-je capable de le faire ? à quelqu'un d'autre surement, mais pas Clémente...pas elle...cela m'était impossible. Elle m'avait déçue certes, mais je ne voulais pas qu'elle ressente la même chose vis à vis de moi.

Je tente alors une dernière fois. Après je laisserai tomber l'affaire, ce n'était plus important...du moins pour moi... Ce qui comptait ce soir, c'est d'avoir renouer le dialogue avec celle que j'appellais ma choupinette il y a pas si longtemps. Je passerai la main avec plaisir aux autres Lyssois s'ils le désirent.

Clémente, la livrée ... tu comptes réellement la garder?

Sans vraiment résister, elle reste assise par terre, renfrognée. Prise au dépourvu depuis le début de ces retrouvailles, elle s'était laissée guidée par les humeurs de Kristal, jonglant entre colère et tendresse au gré de ses réactions. Habituée à feindre les sentiments, elle avait besoin de retrouver ses repères, ne serait-ce pour ce sentiment illusoire de repartir maîtresse d'elle même, et des autres.

Lorsqu'elle tourne son regard vers la lyssoise, ses yeux pétillent de malice, et ses lèvres sont ourlées d'un sourire prétentieux.

Mais bien sûr ! Tu sais, j'adore collectionner les petits cadeaux, les souvenirs. Tu ne voudrais pas que je me sépare de l'un d'eux ?

Lâchant un petit rire, elle se penche pour lui dire sur le ton de la confidence:

As-tu déjà remarqué l'effet qu'elle a sur les hommes ? Portée à même la peau nue, après un moment de partage... Ils en raffolent.

Je me remémore quelques souvenirs lointains ou récents et ne peut m'empêcher d'afficher un sourire à la question de Clémente.

Ces moments sont en effet des plus agréables que ce soit avec ou sans livrée. Mais le plaisir de la chair ne fait pas tout. As tu déjà ressenti des sentiments, as tu déjà dit "je t'aime" en ayant toute connaissance de la profondeur de ce mot. Toi qui tente de tout maitriser, t'es tu sentie au moins une fois prise au piège de tes propres démons ?

Toujours assise à côté d'elle, j'attendais sa réponse. La livrée resterait dans son sac, l'affaire s'arrêtait là. Nous avions passé plusieurs heures à discuter et la fatigue commençait à se faire sentir.

Clémente, je te propose qu'on reste ensemble cette nuit, et si tu le veux, je t'aiderai à sortir de ce labyrinthe demain à la première heure.